Alors, on est ici au Jardin des Batignolles... C'est un lieu que j'ai choisi parce que c'est vraiment... heu... un endroit qui est au milieu des... des différents lieux qui ont été importants pour moi quand j'étais enfant. J'ai commencé la guitare ... heu... au conservatoire du 17ème ... heu... En fait, j'étais au ??? de Paris, et je suis né là, deux rues derrière. C'est également un endroit où, quand j'étais enfant, ... heu... j'venais jouer avec mes amis, donc c'est en plus sympa d'rev'nir ici pour ce reportage.
Moi j'pense que j'ai quand même un parcours assez classique pour un musicien. Heu... je suis né dans une famille où mon père est guitariste, ma mère violoniste, et c'est mon père qui m'a débuté quand j'étais p'tit, à ma demande, quand j'avais 5 ans ... heu..., et c'était vraiment une période ... heu... où pour moi c'était quand même un loisir, mais un loisir qu'était très valorisant. Heu... 'qui fait que, bon j'suis rentré au conservatoire de Paris assez rapidement ... heu... j'ai intégré les classes SAM, et plus tard au CNSM, et... J'pense que le véritable déclic est arrivé quand j'avais 14/15 ans ... heu ... à l'adolescence en fait, quand j'ai vraiment découvert la musique classique; c'est vraiment cette passion qu'est née à ce moment-là qui m'a fait prendre cette décision de devenir musicien.
Quand j'étais enfant j'avais un rapport avec la guitare qu'était quand même ... heu ... assez simple... c'est-à-dire que j'me posais pas trop la question de savoir si c'était véritablement une passion ou un hobby ... heu ... c'était naturel en fait de faire de la guitare. Mes parents faisaient de la musique à la maison, donc je f'sais pareil ... heu... voilà ... heu... j'préparais mes p'tits concours, mes p'tits examens, mes p'tites auditions, j'étais vraiment heureux.
J'pense que quand on commence la guitare très très jeune comme moi, on a un lien, ... heu ... assez fusionnel qui se développe avec l'instrument, c'est-à-dire que on a vraiment l'instrument dans la peau, c'est-à-dire que c'est vraiment naturel de prendre l'instrument; on... quand on joue, on..., ça fait un peu partie de soi et on n'imagine pas une journée sans travailler par exemple, ça n'existe pas. Il manque quelque chose quoi.
Passer par les concours internationaux, c'était même pas un choix ; c'était une opportunité et j'ai l'impression qu'à l'âge où j'étais (j'avais 18 ans, 17/18 ans), je voulais faire des concerts... C'était le seul moyen pour moi! Enfin, y avait peut-être une autre façon de développer, mais j'en voyais pas d'autres, plus immédiate et plus efficace, parce que, finalement entre mes 18 et mes 20 ans, je suis passé de .. étudiant de conservatoire à concertiste international. Les gens disent pas en face ce qu'ils pensent quand c'est négatif, c'est évident.. Bon déjà la première chose, c'est qu'on le voit pas et qu'on le sent pas. Après on en entend parler, mais bon ... Je pense que c'est la vie du musicien aussi, y a.. euh.. On peut pas plaire à tout le monde, il y a des esthétiques, des goûts et des couleurs... c'est pas forcement explicable et je pense que moi mon idée, c'était quand même de toujours rester dans ce que je voulais faire moi, dans ma façon de jouer et ma façon d'envisager la musique. Ce que je pourrais conseiller à des jeunes, des jeunes qui auraient 14/15 ans, donc moi, y a un peu plus une dizaine d'année, qui auraient l'intention de faire des concours internationaux et qui ont l'envie, voire la vocation de démarrer une carrière, c'est de toujours se rattacher à la musique. C'est à dire que même en étant le plus près techniquement, en étant vraiment affûté, ce que les gens retiennent, au final, quand on joue en concert, c'est le musicien. Et c'est peut-être une des dérives de ce système de concours internationaux. C'est d'avoir des gens qui vont être très fort techniquement, très doués, très jeunes et peut-être pas musicien déjà, enfin ils sont très musiciens, mais qui ont pas complètement digéré ce qu'ils voulaient faire réellement, c'est-à-dire qu n'ont pas abouti complètement leur personnalité musicale. C'est peut-être voilà un des dangers de ce système-là, qui par ailleurs, à mon avis a beaucoup, beaucoup d'avantages...
Ca fait maintenant une dizaine d'années que j'ai commencé ma carrière d'artiste et je pense m'être beaucoup diversifié ces derniers temps, notamment avec la musique de chambre et bien évidemment la création du Quatuor Eclisse y a 3 ans. Alors dans les masterclasses que je peux donner, effectivement, il y a souvent beaucoup d'étudiants qui veulent comprendre en fait, comment faire quelque chose de similaire, trouver comment avoir une certaine vélocité ou un certain son, un angle d'attaque... Après, moi j'aborde pas forcement la question de façon aussi claire parce que ce qui marche pour moi ne marchera pas forcement pour tous.
C'est une belle initiative de créer la Paris Guitar Foundation pour pouvoir rassembler les guitaristes, même si on se connaît tous un petit peu, de pouvoir donner un petit peu une autre image de ce qu'on fait, quelque chose un petit peu plus dans l'intimité peut-être que juste l'image du concertiste qui bouge pas et qui brille.
Alors la qualité de vie pour être concertiste, moi, je dirais être bien organsié, beaucoup travailler, faire des efforts et jamais renoncer parce que c'est pas facile tous les jours. Donc, il faut toujours garder en tête ce qu'on a envie de faire, profondément, et même si y a des échecs il faut toujours rester dessus, faut pas lâcher. Voilà ce que je peux dire.
