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Une vie sans stress numérique, certains y parviennent. 90 jours sans se connecter à Twitter, Facebook, Gmail, bref à internet. C'est le défi que s'est lancé un journaliste français - Pierre-Olivier Labbé - un vrai sevrage pour celui qui se définit lui-même comme un "digital addict", en français, un accro au web. Et de cette cure de trois mois, il a tiré un documentaire "Digital Detox" diffusé ce soir sur la chaîne Canal +. Charlie Dupiot l'a rencontré chez lui alors qu'il venait tout juste de se reconnecter.

- Bonjour
- Bonjour
- Alors là, on est dans l'appartement où vous habitez.
- Exactement. Et vous tombez plutôt pas mal, parce que j'étais sur Facebook ! Pris en flagrant délit de réutilisation de mes jouets que j'ai pas eus pendant 90 jours.
- Alors là, dans le salon, on voit donc euh votre ordinateur.
- Oui... mon téléphone, mon smartphone, qui n'est jamais très loin non plus.
- Qu'est-ce que vous en avez fait pendant ces trois mois ?
- Alors, les ordinateurs heu ont été confisqués, le smartphone bloqué dans un coffre-fort. Donc, j'ai récupéré un vieux téléphone, en l’occurrence un vieux Nokia du début des années 90 sans accès internet, pas de mails. L'idée, c'était de se couper au maximum de tout. Moi, le premier geste en ouvrant les yeux, c'était d'ouvrir le smartphone, d'aller consulter mes mails, de faire un check rapide des réseaux sociaux heu pour savoir ce qui s'était passé dans la nuit au cas où. Et pareil avant de se coucher. C'est vrai que d'un seul coup, c'est des habitudes qui n'existent plus, donc heu, c'est là que c'est très agréable. C'est-à-dire qu'à un moment donné, tous ces moments d'inactivité totalement dédiés au smartphone, aux réseaux, aux sites d'info, enfin ce qu'on veut en tout cas sur internet, d'un seul coup, c'est des moments qu'on récupère. Très vite, je me suis vu penser à des petites choses que j'avais entendues le matin et que j'avais envie de faire le lendemain. Juste penser. Ce qui est fou dans l'utilisation d'internet, c'est que c'est ultra insidieux. Si je vous dis, « je passe quatre heures par jour sur un réseau social », vous allez me dire « mais il est fou, comment il - euh- en bossant, en ayant des enfants, il peut passer quatre heures par jour sur un réseau social ? ». Ça ne paraît pas possible. C'est l'addition de plein de petits moments. Vous savez en moyenne, chaque Français dégaine son smartphone 150 fois par jour avec un temps d'utilisation moyen de deux minutes. Vous faites le calcul, et on y est. Il y a un autre constat : c'est que les réseaux sociaux - Facebook et Twitter pour ne citer que ceux-là - sont devenus des vraies plateformes de communication et même entre amis pour euh inviter quelqu'un à un anniversaire. Ce qui fait que d'un seul coup, vous ne faites plus partie de ça et que vous avez l'impression de tourner au ralenti dans un monde qui lui avance très vite. Voilà. Et je sais que j'ai loupé énormément de choses. J'ai un exemple qui est la naissance du troisième enfant d'un vieux pote et qui euh au moment de la naissance a communiqué en l'occurrence sur Facebook pour dire que le divin enfant était arrivé donc ça a été amplement liké, commenté, sur-commenté, et moi je suis passé complètement à travers de ça. Il a pas nécessairement pensé à m'envoyer un texto ou à me passer un petit coup de fil que à moi, voilà. Et je l'ai appris, je crois 48 ou 72 heures plus tard en croisant quelqu'un. Finalement, c'est pas si grave d'apprendre la naissance du fils d'un pote trois jours après. Au début, ça angoisse en disant « je suis le seul à pas le savoir, aah ». Et puis finalement, non. La maman m'en a absolument pas voulu et tout va bien.
- Aujourd'hui, après cette expérience, vous avez réduit votre temps sur internet, sur les réseaux sociaux ?

- Réduit, j'en suis pas sûr, en tous cas je fais différemment. Mon téléphone est éteint la nuit, je ne l'ai pas en me couchant, donc je ne l'ai pas en me levant. Quand je suis avec mes enfants, quand je joue avec mes enfants, je suis avec mes enfants. Le téléphone, il est éteint, il est à l'autre bout de l'appart', et... euh... si il sonne, le message, ou la notification, je l'aurai que quand j'aurai terminé de jouer avec mes enfants. Et c'est vrai que c'est quelque chose que je ne faisais pas. Je jouais avec mes mômes, le téléphone il était dans la poche, si ça faisait bip, je regardais, voilà. C'est moi qui aujourd'hui décide d'aller dans le téléphone, quand je l'ai décidé. Je parle du smartphone et d'internet. Ce n'est plus le téléphone qui vient à moi quand il sonne, quand il vibre, quand euh... voilà. Et du coup j'ai l'impression de beaucoup moins subir. Et je pense qu'on peut tous réfléchir à nos comportements numériques, et que pour la première fois dans la mesure où on a pris cette révolution numérique de façon assez puissante et ultra rapide en pleine face, je pense que pour la première fois, on commence à se poser et à regarder ce qui nous est arrivé.