Aujourd'hui... euh, aujourd'hui le bonheur devient rare. On a de l'argent, on a nos supermarchés plein à craquer, on a.. on a théoriquement tout ce qu'il faut pour être heureux. Le sommes-nous ? Moi j'ai envie d'être heureux sur cette planète, j'ai pas envie d'être un type qui produit des marchandises à vendre pour faire du capital financier. C'est pas, non, c'est pas.. je refuse, et c'est la raison pour laquelle j'ai quitté, avec mon épouse, heureusement j'ai trouvé une femme, une parisienne avec laquelle on s'est bien entendus.Cela dit, on travaillait dans l'entreprise avec ce tintamarre, avec cette accélération, et que... pointer tous les jours... faire... faire... Non, ma vie n'est pas faite pour ça ! Ma vie n'est pas faite pour ça.
Ma vie, elle est faite pour se réjouir etc. Donc c'est la raison pour laquelle, ben... on a quitté cette, ce ce ce, cette ville d'abord entièrement artificielle, on vivait que dans l'artificiel, pour rejoindre la nature, jouir du chant des oiseaux, jouir des fleurs, des forêts, du ciel, du couché de soleil, de... Moi je suis pas né pour être enfermé toute ma vie dans euh... d'ailleurs j'amuse les gens en disant bon voilà, soit disant le le, soit disant le progrès libéré l'être humain mais quand regardez l'itinéraire d'un être humain dans la modernité, de la maternelle à l'université on est enfermés, on appelle ça le bahut. Ensuite tout le monde travaille dans des boites, des petites des grandes boites... euh... on va même s'amuser en boite, on y va dans sa caisse et puis on a la boite à vieux puis en attendant la dernière boite. Un itinéraire de vie comme ça, non ! Non ! Je suis pas né pour ça ! Et tout ça aboutit à quoi ? A produire du capital financier qui est accaparé par une minorité humaine, c'est qu'on réinstaure la féodalité à l'échelle planétaire. Des gens qui sont sur-nantis, d'autres qui ont, qui suivent, comme ils peuvent: les classes moyennes. Et puis ce qui ont pas grand chose et puis ce qui ont carrément faim, et il y en a sur cette planète un milliard qui ont faim, trois milliards qui mangent à peine. Tout ça pour que cette féodalité planétaire du capitalisme universel puisse instaurer une suzeraineté absolue sur l'ensemble, sur l'ensemble de l'humanité, ça non ! C'est pour ça que je prêche la sobriété heureuse. En étant sobre je répond bien sûr à mes besoins. Il s'agit, je... me nourrir, me vêtir, m'abriter dans une maison et me soigner ou être soigner c'est pas négociable. Il faut, ça ça doit être résolu absolument pour tout le monde.Et ensuite, ben, à moi de voir et je n'ai pas envie d'avoir tellement de superflu et que ce superflu se retourne contre moi... me prend mon temps et ma vie pour... pour finalement me donner des illusions. Donc euh, voilà c'est un choix, un choix de vie. Moi j'ai envie de, d'écouter les oiseaux, j'ai envie d'admirer les forêts, d'admirer un oiseau dans le ciel et voilà et je suis né pour ça, je suis pas né pour être un producteur-consommateur jusqu'à la fin de mes jours.
Nous, nous avons inventé, ben, la vitesse, l'accélération, on a inventé le moteur à explosion, on a inventé, donc qui modifie en quelque sorte la cadence du temps, donc il accélère le temps. Et en accélérant le temps ça accélère aussi notre vision de l'espace, parce que quand je marche à pied ben l'espace je peux le contempler etc. Si je passe en voiture l'espace je peux plus le contempler. Et alors, toutes ces modifications là sont à mon avis antinaturelles et je crois vraiment que c'est la source d'une grande partie du malaise que nous ressentons dans ce monde.
Moi il se trouve que j'ai eu la chance de choisir d'être agriculteur, paysan etc. Ben je suis bien obligé, c'est pas, je vais pas planter mon pommier et le récolter le lendemain, je peux pas semer des carottes et revenir le lendemain les récolter.Il faut bien que les choses prennent le temps et ce temps là par l'accélération à mon avis a dénaturé finalement notre présence, notre présence au monde et c'est la source de beaucoup de maux, de stress et je suis persuadé qu'une grande partie des pathologies sont dues à ce temps toujours et on est toujours... la montre qui tourne et on est toujours en train de se dire : il faut pas perdre de temps, il faut en gagner. "time is money". C'est terrible, "time is money" vous vous rendez compte ? Le temps c'est de l'argent, alors le temps c'est pas de l'argent. Le temps c'est de la durée, le temps ça devrait être de... ça devrait être la cadence de notre travail, la cadence de notre existence. Il faut aussi apprendre à perdre du temps, parce que perdre du temps aujourd'hui c'est absolument abominable c'est.. Et il faut surtout pas perdre de temps. Et finalement au final c'est pour produire de plus en plus d'argent,plus en plus... augmenter le PIB, le PNB etc. C'est vraiment d'une stupidité incroyable.
On est bouffés par le superflu, on a une bagnole comme-ci, il faut une bagnole autrement, on vous amène un bagnole encore mieux c'est... encore comme-ci comme-ça, avec des options machin truc. Une bagnole c'est rien qu'un outil qui doit m'emmener en sécurité d'un point à un autre, point final.
La publicité joue sur le fantasme. C'est qu'une voiture c'est un outil de déplacement mais qui est enrobée de fantasme, on met dans la tête de la personne quelque chose comme si, je sais pas, il choisissait une femme ou je sais pas quoi, il faut que ça soit ci, que ça soit ça et c'est ça qui nous coûtent cher. Autrement l'outil en soit, ben il est simple : quatre roues, un moteur, bon euh... quelque chose qui m'emmène en sécurité d'un point à un autre, point final. Et si je veux y mettre tous mes rêves, si il répond à toutes mes frustrations, la comparaison de ma voiture avec la voiture du voisin, ma classe sociale qui est meilleur que... on est piégé par... on est piéger par quoi ? Par soi. C'est tout.
Nous sommes sur une planète limitée, et que cette planète limitée elle ne peut pas nous offrir tout ce que nous voulons. Elle est limitée. Et en plus avec l'arrivée maintenant des pays émergeant etc. Si tout le monde se met à fonctionner sur le même système du toujours plus, logiquement, enfin d'une façon très rationnelle ça n'est pas possible. Donc il faut repenser disons, notre rapport aux ressources de la planète, à la nature elle-même, sur la limitation, sur l'auto-limitation. L'éducation de l'enfant, on éduque pas les les enfants justement ni à la modération, ni à autre chose. Au contraire, l'enfant est devenu l'un des sujets de profit exorbitant avec de la pacotille. Quand je vois certains jouets d'enfants qui se cassent dans la journée même, qui sont... Donc l'enfant lui même est piégé et dès le début il est engagé dans une forme de frustration à laquelle il doit répondre, c'est-à-dire, au lieu de lui enseigner la satisfaction "regarde comme... ça te suffit largement, c'est bien etc." Ben non, alors il compare avec ses copains etc etc. Puis c'est l'escalade, toujours plus, puis il harcèle les parents pour que les parents lui achètent ceci, ce que le copain a etc. Ils sont aussi piégés par ça. Donc ça veut dire qu'il y a un changement de vision et de paradigme de la société toute entière qui doit considérer, qui devrait à mon avis aller vers cette sobriété heureuse, c'est-à-dire ou dire... parce que très souvent acheter acheter acheter c'est souvent combler des frustrations, combler du vide. Quelqu'un qui est bien, bien en lui même, qui a ce qui lui faut intérieurement n'a pas besoin de combler du vide. Il me semble que dans une société, évidemment, dans laquelle nous sommes pas satisfaits et cette insatisfaction ben nous amène à combler du vide. Et le vide c'est le tonneau des Danaïdes, c'est à dire qu'on peut jamais le remplir pourquoi parce qu'on ne travaille pas sur notre intériorité, sur la posture que l'on doit avoir à l'égard de ce qu'il nous est nécessaire dans la vie. Si vous voulez, moi je dis les choses... je prétends pas que Pierre Rabhi va réformer le monde. Si les gens ne comprennent ils ne comprennent pas. Je veux dire, qu'est-ce que j'y peux ? Moi ce que j'invite c'est à se désaliéner, à se dire "bon certes j'ai peut-être moins de matière mais j'ai plus d'être. Et en étant plus dans mon intériorité, dans mon évolution intérieur, dans la joie que je peux construire en moi-même, ça c'est pour moi vraiment tout bénéfice comme on dit. Je suis pas là en train de dire "faites comme je vous dis et pas faites comme je fais". Voilà. Si les gens ne comprennent pas, moi je n'y peux rien je veux dire, après moi voilà. J'ai témoigné qu'on pouvait vivre autrement, on a choisi la sobriété comme mode de vie alors qu'on nous demandé de développer notre ferme de plus en plus, on a dit non, on a ce qu'il faut ça suffit. Je peux, je peux pas faire plus.
Merci beacoup Samuel! :)